Divorce et assurance-vie

Assurance-vie : quelles conséquences en cas de divorce ?

Lorsqu’une personne souscrit un contrat d’assurance-vie, elle ne mesure pas toujours les conséquences au regard de sa situation matrimoniale. Pourtant, le régime matrimonial choisi produit des effets très différentes et importants d’un point de vue civil. Il ne faut donc pas méconnaître ces effets qui sont malheureusement trop souvent sous-estimés et découverts  à l’occasion d’une séparation et d’un divorce.

1. Le contrat d’assurance-vie est-il un bien commun ou un bien propre ?

Selon le régime matrimonial choisi la distinction entre bien commun ou bien propre est plus au moins évidente.

Pour le régime de la séparation de biens, la situation est claire : il n’existe pas de communauté. L’assurance-vie est donc toujours un bien personnel de l’un des époux.

Pour les régimes communautaires, il faut regarder les choses de plus près :

⇒ Pour le régime de la communauté réduite aux acquêts (régime légal = régime applicable en l’absence de contrat de mariage) : le contrat d’assurance-vie est qualifié de bien commun si le contrat est alimenté par des fonds communs aux deux époux et qualifié de bien propre s’il est alimenté par des fonds personnels de l’un des époux.

⇒ Pour le régime de la communauté universelle avec clause d’attribution intégrale, où l’ensemble des biens des deux époux sont réputés appartenir à la communauté, le contrat d’assurance-vie souscrit, même par un seul d’entre eux, est un bien commun.

2. Le sort du contrat d’assurance vie en cas de divorce

Pour les contrats d’assurance-vie souscrits entre conjoints mariés sous un régime communautaire : La somme représentant l’épargne accumulée sur un contrat d’assurance vie entre dans l’actif d’une communauté en dissolution. Elle sera donc partagée entre les époux.

Pour les contrats d’assurance-vie souscrits par l’un des époux marié sous un régime de communauté : le divorce ne met pas fin à ces contrats.

En effet, depuis l’arrêt dit Praslika, l’époux marié sous un régime de communauté et qui a souscrit avec des deniers communs un contrat d’assurance-vie doit, en cas de divorce, dédommager son conjoint pour la moitié de sa valeur. Le contrat d’assurance-vie est réputé être fait par la communauté. La valeur de rachat tombe alors dans l’actif communautaire et peut donc être partagée.

Attention, selon l’article 1401 du Code Civil, dans le cadre d’un régime de communauté, tous les biens sont communs. En l’absence de mention précise de l’origine des fonds (via une clause d’emploi ou de remploi) le contrat est réputé comme étant « commun ».

Exemple : Un époux marié sous le régime de la communauté réduite aux acquêts a souscrit pendant son mariage un contrat d’assurance-vie. Ce placement lui permettait, par versements provenant de la communauté conjugale, de constituer une épargne retraite tout en lui laissant la disposition des sommes épargnées. A la date du divorce, le contrat fait partie de l’actif de la communauté. Si aucun élément ne permet de démontrer que le compte aurait été alimenté pendant l’union à l’aide de biens personnels, l’épargne disponible au moment de la liquidation sur ce compte constitue un bien commun.

3. Le cas des contrats acceptés par le conjoint bénéficiaire

Quel que soit le régime matrimonial, le divorce est sans incidence sur les contrats acceptés par le bénéficiaire désigné quand il s’agit du conjoint en instance de séparation ou divorcé.

Dès lors que le conjoint est nommément désigné comme bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie et qu’il a procédé à l’acceptation du contrat, la clause bénéficiaire devient ainsi irrévocable. Dès lors, le conjoint nommément désigné restera bénéficiaire du contrat même après le divorce.

En effet, depuis le 1er janvier 2005 (réforme du divorce), l’assurance vie souscrite entre époux, en tant que donation entre vifs de biens présents, est devenue irrévocable, en cas d’acceptation expresse ou tacite du bénéficiaire. Elle survit au divorce, quelle qu’en soit la cause. Son sort est donc indifférent à la situation matrimoniale du souscripteur.

Cette irrévocabilité ne s’applique pas aux donations antérieures, c’est-à-dire aux polices d’assurance vie déjà acceptées au 1er janvier 2005 : dans ce cas, le droit commun des libéralités s’applique avec le principe de la libre révocation des donations entre époux.

La désignation nominative du bénéficiaire du contrat d’assurance-vie pose de nombreux problèmes en cas de divorce. Il est donc certainement plus judicieux de ne pas désigner nominativement le bénéficiaire mais de s’en tenir à seule mention de la qualité de conjoint.

À savoir: lorsqu’une clause précise à la fois «mon conjoint» et le nom et prénom de celui-ci, la compagnie d’assurance considérera généralement que la personne reste bénéficiaire, même si elle n’est plus le conjoint.

Qu’il s’agisse de la rédaction d’une clause de remploi de fonds propres ou de la rédaction d’une clause bénéficiaire pour vos contrats d’assurance-vie,  faites-vous conseiller pour que vos contrats soient adaptés à votre situation personnelle et familiale. En abordant certaines problématiques bien en amont de toute situation conflictuelle, de nombreuses situations délicates pourront ainsi être évitées.

SYNTHÈSE

Couple marié en séparation de bien

Le divorce n’a aucune incidence sur les contrats d’assurance-vie car il n’existe pas de communauté.

Couple marié sous le régime de la communauté réduite aux acquêts

→ Contrat souscrit en commun par les 2 époux → divorce → le contrat entre dans l’actif de la communauté en divorce → partage entre les époux.

→ Contrat souscrit par l’un des époux avec des derniers communs → divorce → Arrêt Praslika : le contrat est réputé être fait par la communauté, il tombe dans l’actif communautaire → le contrat continue d’exister mais le souscripteur doit dédommager son conjoint pour la moitié de sa valeur (valeur du contrat au jour du divorce).

→ Contrat souscrit par l’un des époux avec des deniers propres (via une clause de remploi de fonds propres) → divorce → le contrat demeure un bien propre du souscripteur (le divorce est donc sans effet sur ce contrat) → pas de partage → pas de récompense pour le conjoint non souscripteur.

Couple marié sous le régime de la communauté universelle avec clause d’attribution intégrale

L’ensemble des biens des deux époux sont réputés appartenir à la communauté → divorce → le contrat d’assurance-vie, même souscrit par un seul époux est un bien commun et entre dans l’actif de la communauté en divorce → partage entre les époux.

Cas des contrats acceptés par le conjoint bénéficiaire (nommément désigné)

→ Pour les contrats souscrits et acceptés après le 1er janvier 2005 → irrévocabilité → quel que soit le régime matrimonial, le divorce est sans incidence sur les contrats acceptés par le bénéficiaire désigné quand il s’agit du conjoint en instance de séparation ou divorcé.

→ Pour les contrats souscrits et acceptés avant le 1er janvier 2005  droit commun des libéralités libre révocation des donations entre époux.